(reproduction d’un article de Michel Bélair paru dans Le Devoir le 21 février 2015)
On connaît André Surprenant depuis son passage à Cap-aux-Meules, aux îles de la Madeleine. L’enquêteur a résolu là deux sombres énigmes (On finit toujours par payer, Le mort du chemin des Arsène, La courte échelle, 2003 et 2009) avant d’être transféré à Beauport, en banlieue de Québec, où il a tiré au clair une autre histoire difficile (L’homme du jeudi, La courte échelle, 2012). Mais voilà que, pendant que Jean Lemieux passait de son ancien éditeur à Québec Amérique, son personnage André Surprenant quittait, lui, la Sûreté du Québec pour rejoindre le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). On le retrouve maintenant à « Versailles », à l’escouade des Crimes majeurs, enquêtant sur un restaurateur italien assassiné dans une ruelle, la main droite tranchée.
Père manquant, fils…
Tout au long de l’enquête, l’auteur du crime semble deviner à l’avance chacune des initiatives de Surprenant et de son partenaire LP Brazeau qui, rapidement, en viennent à soupçonner un lien avec le trafic de drogue. Lorsqu’un deuxième puis un troisième cadavre à la main coupée apparaîtront sans prévenir et presque sans raison, comme pour faire dévier l’enquête, il deviendra évident qu’une taupesévit à l’intérieur même du SPVM. Surprenant verra du coup son enquête prendre des proportions étonnantes, d’autant plus qu’il est sur la piste de son père disparu sans laisser de traces alors qu’il était encore enfant.
Le traitement de ces trois enquêtes parallèles constitue l’épine dorsale du roman. Les personnages de Lemieux sont tous crédibles et plus ou moins solidement campés selon leur importance. Du chroniqueur judiciaire à l’étudiante qui se prostitue pour payer ses études puis qui sombre, tout ce monde qui grenouille près de l’ombre du crime organisé est très justement décrit, plausible et pertinent. Mais il y a surtout que l’on découvrira vraiment le personnage d’André Surprenant, qui n’était jusque-là qu’un flic un peu plus intuitif et plus « vite » que les autres. On le savait plus ou moins coupé de sa famille et l’on comprendra ici pourquoi. Le dénouement de cette partie de l’intrigue est d’ailleurs tout aussi étonnant que la résolution du crime et la découverte de la taupe.
Avec toutes ses allusions à Jacques Ferron, son écriture efficace et toujours juste, sa quête des origines et cette histoire en trompe-l’oeil dans un milieu de ripous et de balances, ce Mauvais côté des choses est sans aucun doute le meilleur livre de Jean Lemieux. André Surprenant est maintenant un personnage arrivé à maturité, peut-être un peu parce qu’il a retrouvé ce père qui lui manquait, mais surtout parce que c’est un homme intègre aspirant à vivre des relations authentiques avec les gens qui l’entourent. Sans fla-fla, sans pouvoirs de superhéros ou de super-raisonneur « Asperger », Surprenant est un flic intelligent et profondément humain. Le meilleur de sa carrière d’enquêteur est à venir… et c’est une fort bonne nouvelle pour nous.
Est ce qu’il y aura une suite au roman Le mauvais côté des choses.
Bonjour M. Defoy,
il y a eu une suite au Mauvais Côté des choses: «Les Clefs du silence» et «Les Demoiselles de Havre-Aubert». Chaque livre contient une histoire à part, mais s’inscrit dans une trame temporelle de type «série».
Un 7e Surprenant est en cours d’élaboration.
Bon dimanche,
Jean Lemieux