En ce soir où j’ai rangé, superstition oblige, mon t-shirt polonais (Qui sait? Il servira peut-être bientôt à conjurer un éventuel départ de la chance?), j’ai envie de parler de ce drôle de petit livre qu’est Petites infamies de Carmen Posadas.
J’ai parlé de petit livre. Ce n’est pas péjoratif. En ces jours où les grands singes jaunes de Bornéo sont menacés de disparition, pourquoi consommer de l’huile de palme et pourquoi écrire un gros livre quand on peut en écrire un petit? N’est-ce pas Léopold Mozart, le père de l’autre, qui disait que «les petites choses sont grandes quand elles sont bien faites»? Petites infamies, comme son titre l’indique n’a rien à voir avec Cent ans de solitude ou Le quatuor d’Alexandrie. C’est un roman de 300 pages, à cheval entre le polar et la peinture de mœurs, campé dans une Espagne moderne mais intemporelle, qui emprunte à la fois à la tragédie grecque et à la littérature de gare.
Il y a d’abord ce délicieux premier chapitre où Néstor Chaffino, cuisinier de son état et par ailleurs atteint d’un cancer du poumon, meurt enfermé à quatre heures du matin dans une chambre froide Westinghouse dont la porte s’est refermée (par inadvertance?). Le reste s’en suit, dont cet étonnant chassé-croisé de personnages liés les uns aux autres par le passé, par le présent et par le futur.
Ce roman, dont l’édition originale date de 1998, n’est pas une grande œuvre, mais c’est un livre qui possède un parfum et une gueule, ce qui n’est pas si fréquent. Le récit témoigne d’une indéniable maestria narrative et d’une ironie corrosive, dont le titre n’est qu’une indication.